Une fois n’est pas coutume, on vous parle d’une pièce qui se joue… à Paris, au Théâtre du Vieux-Colombier de la Comédie-Française depuis le 29 janvier. Tommy Milliot met en scène le diptyque L’Intruse et Les Aveugles du dramaturge belge Maurice Maeterlinck. Un projet qui n’est cependant pas sans lien avec celui du nouveau directeur du NTB. La Comédie-Française viendra en effet présenter à Besançon, le 8 juillet prochain, Les Serge (Gainsbourg point barre), un rendez-vous « Ici & Là » délocalisé à la Citadelle. L’occasion d’évoquer avec Tommy Milliot plusieurs axes forts de son nouveau mandat à Besançon.
L’action de L’Intruse se déroule dans un château. Un grand-père, aveugle, a l’intuition que la mort va s’abattre sur la maison. Une jeune mère se repose dans une chambre, affaiblie suite à un accouchement difficile. Le nouveau né lui, dort dans une autre chambre, mais ne fait pas un bruit. Privé de la vue, l’aïeul possède cependant un sixième sens, une sorte de vision intérieure. Toute la pièce repose sur l’attente de la mort, sa survenue prochaine. L’Intruse, c’est elle. Elle approche.
Dans Les Aveugles, Maeterlinck nous présente cette fois six hommes et six femmes aveugles, en extérieur dans une forêt, accompagnés de leur aumônier. Pensant que ce dernier s’est absenté, les aveugles ne peuvent (sa)voir que l’aumônier a rendu son dernier souffle, appuyé à un tronc…
Diversions : Comment avez-vous été amené à collaborer avec la Comédie-Française ?
Tommy Milliot : J’ai présenté en 2016 Lotissement de Frédéric Vossier au festival Impatience. C’est là que j’ai fait la rencontre d’Éric Ruf qui est l’administrateur général de la Comédie-Française. Il était au sein du jury. C’est lui qui m’a invité à venir travailler avec la troupe de la Comédie-Française suite à cette rencontre. Il m’a réinvité cette saison.
Est-ce vous qui avez proposé L’Intruse et Les Aveugles ?
J’ai proposé en effet qu’on puisse travailler sur Maeterlinck, un auteur considérable qui a révolutionné le drame en son temps, Prix Nobel de littérature. À la Comédie-Française, tout se fait toujours en dialogue avec l’administrateur général. C’est une machine à créer formidable. Un théâtre où il n’y a que de la création, plus de 400 permanents, des corps de métiers qui sont très importants dans chaque service.
Pourquoi monter ces pièces ensemble ?
Ces deux pièces de 1890, qui se présentent comme deux drames en un acte, m’intéressaient car elles sont une parabole très forte de notre condition humaine. J’ai voulu monter ces deux pièces en miroir, pour ce qu’elles racontent de cette cécité, cette impossibilité pour l’homme de savoir ce qu’il va advenir.
Vous réalisez vous-même vos scénographies, et celle-ci a été conçue dans la capitale comtoise…
Oui je l’ai réalisée avec tout le savoir-faire de l’atelier décors de Besançon, et un travail remarquable a été fait. C’est une énorme boîte de bois de six mètres de haut, dans laquelle vont se jouer les deux pièces. L’espace se transforme pendant l’entracte. L’Intruse est une pièce d’intérieur, et Les Aveugles une pièce d’extérieur. Dans L’Intruse on est dans un huis-clos où le hors champ est très puissant, alors que dans Les Aveugles tout se passe sur scène.
Un autre pont avec la Comédie-Française est le Bureau des Jeunes, une nouveauté de la saison, extension décentralisée du « Jeune Bureau » à la Comédie-Française.
Il y a en effet le Jeune Bureau à la Comédie-Française et nous, nous avons le Bureau des Jeunes, des jeunes gens d’horizons et milieux sociaux très variés. Ce n’est pas un endroit où on va faire une formation, plutôt un endroit de partage et de transmission, comme je l’ai voulu très fort dans le projet. Il y a des ateliers réalisés par Héloïse Desrivières, notre autrice associée. Elle travaille sur la dramaturgie des pièces présentées dans la programmation. Il y a des ateliers d’écriture, de mise en voix… Les jeunes viennent voir les spectacles également. Ils vont aller à la Comédie-Française pour voir un spectacle cette saison dans la salle Richelieu, Le Bourgeois Gentilhomme mis en scène par Valérie Lesort et Christian Hecq. Et ils auront un atelier là-bas. Inversement, on accueillera le Jeune Bureau à Besançon. On fera un grand atelier autour de Qui a besoin du ciel et Naomi Wallace (présentée en mars au NTB).
Le Bureau des Jeunes prendra-t-il également part à Jours de Fête, le grand temps fort du NTB en juin prochain ?
Oui à Jours de fête, on inverse un peu les rapports, et le plateau qui est réservé aux professionnels d’habitude va être réservé aux pratiques amateures. Dans mon désir de transmission, il y aura des travaux du Bureau des Jeunes, du DEUST Théâtre de Besançon, du conservatoire, de nos ateliers amateurs…
Et cela se déroulera donc avant l’accueil de la troupe de la Comédie-Française à Besançon le 8 juillet, pour mettre un point final à votre première année à la direction du NTB.
Oui j’avais envie d’accueillir ce spectacle à Besançon, Les Serge (Gainsbourg point barre), parce que c’était la possibilité de faire un partenariat avec la Comédie-Française, le CDN, La Rodia et la Citadelle de Besançon qui est un grand lieu de patrimoine. On pourra proposer ce spectacle aux Bisontins et aux Bisontines, accueillir plusieurs générations. Les Eurockéennes étaient aussi intéressés par le spectacle (le 6 juillet), puisqu’Éric Ruf est originaire du Territoire de Belfort. J’espère que ça va être un beau moment pour clore notre saison !
Propos recueillis par Dominique Demangeot
L’Intruse et Les Aveugles, Paris, Comédie-Française, Théâtre du Vieux-Colombier, du 29 janvier au 2 mars
https://www.comedie-francaise.fr/fr/evenements/lintruse-et-les-aveugles-2425
Plus d’infos sur la programmation du NTB : https://ntbesancon.fr/