ÉCONOMIE
Société d’Ethnologie
Parution le 16 février
L’économiste, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, publie la conférence qu’il avait donnée en mars 2022 au musée du quai Branly – Jacques Chirac, invité par la Société d’Ethnologie. Un texte synthétique qui jette les bases d’une réflexion sur l’égalité, économique principalement, mais qui va s’intéresser aussi aux problématiques du genre et de l’écologie.
Thomas Piketty évoque tout d’abord les inégalités sociales, démontrant que celles-ci ne seraient pas une fatalité, reprenant sa Brève histoire de l’égalité (Seuil, 2021) ainsi que la World Inequality Database, établie aux côtés d’autres chercheurs. Dans la lutte contre les inégalités, l’économiste démontre le rôle proéminent des combats syndicaux et politiques, plutôt que les catastrophes et les guerres, s’appuyant sur des chiffres précis et de nombreuses cartes, analysant notamment les inégalités en matière de revenus mais aussi de patrimoine, deux notions devant être distinguées. L’occasion pour Thomas Piketty de rappeler l’écart toujours important entre la rémunération de certains dirigeants d’entreprises et de leur employés, et d’observer, encore de nos jours, « une concentration extrême du pouvoir économique ».
Il nuance par ailleurs l’« autosatisfaction égalitaire consécutive à la Révolution française », un chapitre du roman national français, même si l’on constate une amélioration en ce qui concerne le salaire des femmes depuis les années 70. En matière de lutte pour l’égalité, la Suède est citée en exemple à travers l’impôt progressif. Si jusqu’à la Première Guerre mondiale, les plus riches avaient le plus de voix en matière de suffrage, l’émergence d’une classe ouvrière alphabétisée et éduquée a cependant changé la donne. Ainsi face aux inégalités, point de déterminisme, des solutions existent puisqu’« […] un pays n’est jamais inégalitaire ou égalitaire par nature », explique l’économiste. Les failles éducatives sévères qui touchent la France aujourd’hui devraient donc nous alerter, et Thomas Piketty de s’interroger sur les manières de parvenir à une « égalité des droits d’accès à des biens fondamentaux », à l’image de l’éducation, de la santé sans oublier l’environnement, ce qu’il nomme « capital naturel ». Une « participation politique » davantage développée, une culture de la cogestion, dans l’entreprise mais aussi en matière de vie publique, n’en paraissent alors que plus urgentes.
Paul Sobrin