FRENCH DREAM POP
KMS Disques / A+LSO / Sony Music
Trois ans après Sémaphore, album remarqué, Marion Brunetto empoigne à nouveau ses chers claviers vintage (Casio et compagnie) et ses guitares pour un voyage dans les cieux nocturnes. La Varoise parsème son troisième disque d’allusions plus ou moins directes à la voûte céleste, pour nous servir une pop rêvée (les journalistes ont d’ailleurs trouvé le qualificatif qui va bien, dream pop), musique ouatée et stratosphérique.
Composé majoritairement dans son home studio, enregistré en partie à l’ancienne sur un huit pistes à bandes (malgré un détour par les studios bruxellois d’ICP pour le chant et les parties de batterie assurées par Marion elle-même), Bye Bye Baby est furieusement pop dans son emphase mélodique, « les cheveux dans le vent » comme l’artiste le chante dès les premières secondes de l’album. La Première vague, Requin Chagrin la prend d’emblée, surfant sur des nappes de claviers aériens, pour ne plus redescendre de tout le disque. « Je passais souvent l’été à guetter l’océan », chante-t-elle encore, comme une référence au précédent disque Sémaphore où Requin Chagrin prenait plaisir à fendre de sa nageoire caudale la grande bleue. Ici le voyage est cependant moins maritime que cosmique.
Sous les réverbères et sous la Reverb’ qui donne son ampleur au disque, les cieux nocturnes sont en effet propices aux confidences désenchantées et aux rapprochements amoureux (« sous la lune dans tes bras », Déjà vu), et si les refrains sont le lieu d’une mélancolie affichée « sous le signe du chagrin », ces dix morceaux sont également empreints d’une légèreté pop ancrée dans les années 80, avec des bouts de new wave dedans, des ritournelles à la Daho mises au point sous confinement. À entendre la planante chanson titre, on comprend aisément pourquoi Nicola Sirkis choisissait Marion en tant que première signature sur son label KMS en 2018. Cette dernière promène avec aisance sa voix basse, presque androgyne parfois, en mode intimiste ou sur des tempi un peu plus rapides (Volage, Roi du silence). Dans ce road trip « à ciel ouvert », claviers et guitares noyés dans un sirupeux delay, la musique de Requin Chagrin prend de la hauteur et rend nos nuits un peu plus blanches.