Article publié à l’origine dans l’édition d’avril 2018 du journal Diversions – consulter le PDF ici –
Sa plume, il l’exerce à la fois dans les romans et dans ses paroles de chansons. Gaël Faye, qui se produira au Noumatrouff de Mulhouse le 5 mai prochain, nous donnera un aperçu de sa poésie urbaine, tissée entre l’Afrique et l’Europe.
Gaël Faye au Noumatrouff de Mulhouse le 5 mai – Photo : DR
Avec Petit Pays, son premier roman publié en 2016, Gaël évoquait ses racines franco-rwandaises, à travers le récit d’un enfant à Bujumbura dans les années 90, une innocence détruite par les conflits au Burundi et au Rwanda. Lorsqu’il arrive en France en 1995 pour fuir le génocide, il découvre une autre culture, le hip-hop. Quinze ans plus tard, le duo Milk And Sugar, qu’il a formé avec Edgar Sekloka, devient l’une des Découvertes du Printemps de Bourges 2011. Les choses démarrent bien, d’autant que le premier album de Gaël en 2013, Pili Pili sur un croissant au beurre, remporte le Prix Charles-Cros des lycéens de la nouvelle chanson francophone. Gaël transformait l’essai l’an dernier avec l’EP Rythmes et botanique, où l’on retrouve toujours le piano, central dans sa musique. Mais avec l’arrivée de Guillaume Poncelet (pianiste et trompettiste) et Dj Blanka (machines), la palette sonore s’étoffe.
Rythmiques et botanique semble moins sombre, à l’image de la chanson d’ouverture, Tôt le matin. Les frontières sont faites pour être traversées, nous dit l’artiste, qui invite Saul Williams sur Solstice. Les samples sont plus présents dans cet EP qui devrait laisser la place à un nouvel album en 2018. Rythmiques et botanique se déguste comme un melting pot d’influences, ici acoustiques, là électroniques, souvent mélodique et à la prod soignée. Si l’artiste n’évoque pas ici le Rwanda et ses drames, il semble pourtant appeler à un soulèvement, pacifique et collectif, même si l’EP n’exclut pas les moments plus fiévreux, notamment sur l’énorme Irruption, aux paroles fortes, lancées comme un grand cri. Paris métèque est plus apaisé, longue mélopée, poème brillant qui rend gloire à une capitale métissée. À trop courir invite à s’extraire un temps du rythme moderne, pour adopter cette position privilégiée de l’artiste poète qui prend de la hauteur. Joli programme, non ?
– Manu Gilles –
Gaël Faye + Ad El Mariachi, Le Noumatrouff, Mulhouse, 5 mai à 20h30
www.noumatrouff.com