Du 9 au 20 janvier prochains, la Filature invite le public à une nouvelle édition de son festival Vagamondes, proposant théâtre, danse et musique, mais aussi expositions, rencontres, conférences, projections pour évoquer la création autour du bassin méditerrannéen. Une nouvelle fournée de propositions artistiques évoquant notamment les thèmes de la migration, et de l’exil syrien en particulier. La thématique de la révolution sera également traitée, à l’image de l’exposition de la jeune photographe Newsha Tavakolian qui a couvert plusieurs conflits mondiaux. Les photographies de Latif Al Ani évoqueront au contraire une époque de paix en Irak, dans les années 60.
Avec Yes Godot, Anas Abdul Samad traite des conflits qui ont émaillé l’histoire de l’Irak, préférant aux mots plusieurs langages visuels, plaçant ses personnages dans les rues de Badgad. De l’Irak, on passera à l’Italie avec Quasi niente, prenant comme point de départ un personnage issu du long métrage Désert rouge, de Michelangelo Antonioni. Avec Summerless, le metteur en scène et auteur iranien Amir Reza Koohestani achève sa trilogie également composée de Timeloss et Hearing, nous parlant à sa manière très personnelle de la société iranienne.
Le jeune public n’est pas oublié aux Vagamondes avec Géologie d’une fable, présenté par le collectif libanais Kahraba à l’Espace Tival de Kingersheim. Engagé, le collectif mène notamment des projets dans des camps de réfugiés syriens et palestiniens. En partant d’une matière de base qu’est l’argile, Kahraba veut ici remonter aux origines des fables. Il est question d’histoire, de mythes mais aussi de transmission. L’occasion aussi pour le collectif Kahraba de nous rappeler que la notion de frontière est toute relative. Avec Un nôtre Pays, Claire Audhuy ne nous dira pas autre chose. Toujours à l’Espace Tival, elle nous présentera « Ptit bonhomme », un enfant migrant qui arrive en Europe. Claire Audhuy a recueilli le matériau de ce nouveau spectacle en rencontrant des élèves d’écoles élémentaires, des séances durant lesquelles ont été évoquées les thématiques de la migration et du quotidien des réfugiés. Mir Vam (Peace be with you) à voir à l’Espace 110 d’Illzach, parle là encore de la crise migratoire, la metteuse en scène bulgare Neda Sokolovska s’étant rendue dans un camp de réfugiés syriens pour prendre connaissance de témoignages d’exilés. On retrouve Damas avec Chroniques d’une ville qu’on croit connaitre, le dramaturge Wael Kadour et son ami Mohamad Al Rashi dépeignant, à travers le regard de divers personnages, la situation politique, économique et religieuse du pays. Tous des oiseaux, de Wajdi Mouawad, évoque également le croisement des cultures, qui prend ici la forme d’une relation amoureuse entre un jeune chercheur juif allemand et une étudiante arabe résidant aux États-Unis. Le metteur en scène évoque le présent mais aussi l’histoire, les racines d’un mal qui s’étendent jusqu’à la Seconde guerre mondiale. La SoupeCie, avec Je Hurle, nous parlera quant à elle du combat des femmes afghanes usant des armes de la poésie.
Les spectacles de danse nous transporteront en Espagne avec Israel Galván, La Fiesta évoquant sa culture familiale. Avec Ce que le jour doit à la nuit, Hervé Koubi fouille ses racines algériennes, qu’il ne découvre qu’à 25 ans, une découverte qui va exercer une influence non négligeable sur sa propre création artistique. Citons encore le solo d’un jeune danseur, Sorour Darabi, né en Iran et arrivé en France en 2013, où il-elle s’est formé-e à la danse auprès de Mathilde Monnier et Christian Rizzo. Sorour s’inspire pour ce troisième solo de rituels de deuil chiites et de pratiques sadomasochistes.
La musique ne sera pas en reste lors de ces Vagamondes 2019 avec tout d’abord Bachar Mar-Khalifé, né durant la guerre du Liban, sans pour autant se revendiquer martyr, même s’il évoque dans sa musique une soif de liberté bien présente. Le concert de Bachar se tiendra aux Dominicains de Haute-Alsace, accompagné d’un environnement numérique entre traditions orientales et esthétiques électroniques. Nous irons ensuite visiter l’Arménie à l’ED&N de Sausheim, avec comme guide de luxe André Manoukian. Avec son album Apatride, le pianiste promène ses notes dans la tradition arménienne, tradition d’ouverture et d’échanges culturels. Enfin, pour clore ces Vagamondes 2019, la Filature a convié le musicien burkinabé Seydou Boro, qui a fondé à « Ouaga » le premier Centre de développement chorégraphique d’Afrique. Danseur, Seydou est aussi chanteur et musicien, entre folk, sonorités mandingues et blues afro-américain. Avec également une première partie assurée par la Béninoise Perrine Fifadji, la soirée s’achèvera dans le hall de La Filature par un bal moderne africain en entrée libre, orchestré par Seydou.
– Marc Vincent –
Les Vagamondes, La Filature, Mulhouse, du 9 au 20 janvier
www.lafilature.org