BLUES SYNTHÉTIQUE
Heavenly / PIAS / 2017
L’œuvre de Mark Lanegan n’a de cesse d’évoluer depuis qu’il s’est émancipé des Screaming Trees, de ses premiers albums folk chez Sub Pop à ses collaborations multiples avec Isobel Campbell, Greg Dulli (The Gutter Twins) ou en tant que membre à temps partiel chez les Queens Of The Stone Age.
En solitaire, le chanteur à la voix rocailleuse est désormais tourné vers un univers synthétique, un monde où orgue, harmonium et synthétiseur sont omniprésents. Cela était le cas sur son précédent opus Phantom Radio, et il rempile une nouvelle fois sur sa production 2017 mais l’apport de ces instruments est différent. Ils forment une nouvelle architecture à l’album, avec un titre et une pochette évoquant une cathédrale, pour tracer la voie à un blues gothique, la couleur que prend plus que jamais la musique de l’ex leader des Screaming Trees (Blue BlueSea). Cela s’entend dès la piste d’ouverture Death’s Head Tatoo qui évoque Depeche Mode, à se demander si ce ne sont pas les mêmes démons qui habitent Gahan et Lanegan. Des démons endormis de l’addiction, que la voix d’outre-tombe et la froideur d’un son cold wave ne pourront qu’éveiller (Nocturne). L’électronique permet alors de passer d’un titre aux rythmes dub évoquant Bowie comme Drunk On Destruction à une pause onirique comme First Day Of Winter.
Le Band de Mark Lanegan est toujours bien fourni avec Alain Johannes et Jack Irons ou avec les fidèles répondant toujours présents que sont Greg Dulli, Duke Garwood et Joshua Homme. C’est avec ce dernier d’ailleurs qu’on trouve le titre le plus QOTSA de l’album, la fabuleuse Emperor. Album après album, Mark Lanegan écrit une discographie rarement sans inspiration, dont la noirceur est le reflet d’une œuvre lumineuse et plus que jamais passionnante.
Florian Antunes Pires