Du 14 au 16 septembre derniers, Héla Fattoumi et Éric Lamoureux présentaient enfin au grand public leur dernière création Akzak, l’impatience d’une jeunesse reliée, au titre prophétique puisqu’elle avait subi comme beaucoup d’autres spectacles les aléas du Covid. Éric nous parle de cette création à 30 mains (si on a bien compté) et autant de pieds, entre Belfort et l’Afrique.
Quelle est l’origine du projet Akzak ?
C’est le fruit d’un très long processus qui a commencé maintenant il y a deux ans, qui prenait appui sur les relations que nous avons tissées depuis de très longues années avec des écoles de formation sur le continent africain, qui proposent à des jeunes artistes d’épouser un trajet d’artiste. Ayant de nombreuses fois animé des ateliers dans ces écoles, on s’est dit avec Héla que ce serait vraiment important de proposer à certains de ces jeunes une expérience professionnelle, pour qu’ils visent un véritable processus de création.
Imaginé à Belfort, Akzak se partage cependant entre plusieurs pays…
Comme ils viennent du Maroc, de Tunisie, du Burkina Faso et même d’Égypte pour Fouad, on s’est demandé comment travailler à créer les conditions pour les relier. On a eu envie de travailler sur le rythme et on a fait une super belle rencontre, Xavier Desandre Navarre, un percussionniste de génie qui nous accompagne en live.
Le rythme est à la base de la création ?
La pièce a vraiment pris appui sur des séquences rythmiques que les danseurs ont proposées, qu’ils se sont échangées, qui ont été le soubassement de la pièce, considérant que le rythme traverse toutes les humanités, d’hier et d’aujourd’hui.
Que signifie Akzak ?
On a cherché un terme musical qui vient d’un autre champ culturel, des Balkans, donc on ouvrait largement la palette culturelle ! Akzak, c’est l’association de rythmes binaires et ternaires, les cinq temps, neuf temps… Pour sortir de nos habitudes, nous avons compté en quatre et huit temps ! Donc la pièce est travaillée à partir de ces séquences. Un autre groove s’est créé, qui oblige les interprètes à être toujours en alerte, sur le qui-vive, ça déjoue nos habitudes.
Et le son ne provient pas uniquement du percussionniste…
On voulait que tout soit rythme et que tout soit son. Le sol est sonore, les lumières font du rythme, les danseurs prennent la voix à travers des onomatopées. On est tombés grâce à Xavier sur un objet très étrange, un « boomwhacker ». Chaque tube a une note. Ils avaient en même temps une valeur symbolique puisqu’on s’est rendu compte que ces bâtons étaient comme un témoin dans un relais. Comment on fait corps commun dans un relais et comment le passage du relais est important pour l’ensemble du groupe.
Chaque danseur et danseuse part à un moment donné dans un solo…
On voulait également avec Héla conserver les singularités, donc chacun, chacune a des échappées solistes, des échappées « singularisantes » comme on les nomme, pour qu’on puisse bien goûter justement leur qualité très particulière. Ils viennent tous d’un terreau très différent qui les a construits. Certes ils ont eu les trois ans d’études mais ils sont pétris par leurs cultures souches, et ça on ne voulait surtout pas le gommer.
– Propos recueillis par Caroline Vo Minh –
Akzak, l’impatience d’une jeunesse reliée, Mâcon, Le Théâtre, Scène nationale, 1er octobre à 20h30 – theatre-macon.com
Pour les autres dates : viadanse.com
Reportage sur Akzak, l’impatience d’une jeunesse reliée par Diversions