POP TRIP-HOP
Because
Le trio originaire de Nottingham quitte les brouillards anglais pour la Californie. C’est en tous cas ce que laisse présager le titre de ce troisième album de la formation, emmenée par Hannah Reid qui a décidé de se mettre davantage en avant ici, composant textes et musiques. Pourtant, dès l’intro symphonique, aux accents celtiques, on se dit que London Grammar se sent bien dans la brume de ses terres insulaires. Avec Californian Soil, on retrouve tout le charme mélodique du groupe même si ce troisième album affiche également une volonté d’évolution.
Cette Intro de 2’25 fait intervenir les vocalises angéliques d’Hannah sur un arrière-plan de cordes – une constante depuis le succès de Wasting My Young Years en 2013 – avant que ne démarre la chanson titre, un Californian Soil au rythme trip-hop, arpèges de guitare discrets et clairs comme à la grande époque de Massive Attack. Une référence assurément de la part du groupe qui cite évidemment aussi la pop planante de Cocteau Twins. D’un certain côté, Californian Soil s’inscrit dans la continuité des deux premiers opus. Talking dessine des paysages grandioses, brillante unisson des voix et des cordes, débutant sur un piano, ménageant grâce et sobriété tout au long du morceau, avec toujours ce travail sur les voix. La pierre d’angle de Californian Soil, c’est bien sûr le timbre d’Hannah, diamant brut qui n’a rien perdu de sa superbe depuis la sortie de If You Wait en 2013. All My Love avec ses chœurs comme surgis d’une cathédrale et ses arrangements empreints d’un certain mysticisme, est du même acabit, l’emphase le disputant à l’introspection. Lord It’s a Feeling, électro pop atmosphérique, vole elle aussi très haut dans les sphères.
On retrouve ailleurs sur le disque des esthétiques davantage dans l’air du temps. Et c’est justement la deuxième facette de cet album, avec des titres comme le planant Lose Your Head dont le refrain à la rythmique à la fois tendue et mélodique, rappelle les productions de Sia. How Does It Feel nous ferait presque danser avec ses couleurs funky (produit par Steve Mac, ce dernier ayant bossé avec Ed Sheeran), tandis que Baby It’s You, produit en compagnie du Londonien George FitzGerald, nous rapproche là encore des dancefloors. Call Your Friends, Missing et son discret côté gospel, sonnent encore une fois comme ces productions actuelles tournant en boucle sur MTV. Tout en cherchant à évoluer, et peut-être à élargir son public, London Grammar demeure cependant fidèle à lui-même sur des titres moins produits, à l’image d’America qui clôt l’album, toute la place laissée au chant ressortant, sans fioritures, dans ce brillant guitare-voix.