Mister E retrouve John Parish (PJ Harvey, Giant Sand, Sparklehorse), deux décennies après le succès de Souljacker. Ils nous livrent ici une galette remplie de guitares, à la fois concise, brute mais large en matière de styles.
Ce quatorzième disque studio a été conçu entre Bristol et Los Angeles, comme il est aujourd’hui de coutume en cette époque pandémique. Avec Extreme Witchcraft cependant, pas de risque de se retrouver en présence d’un album sans âme. Comme nous le disions plus haut, le disque peut dans un premier temps s’honorer d’une présence forte des guitares. Des six cordes saturées, étirées, maltraitées parfois mais pour le bien de l’art. Mark Oliver Everett y promène son inspiration et fait valser les étiquettes.
Si l’on compare Extreme Witchcraft au précédent opus Earth To Dora, on peinera à retrouver ici les ambiances éthérées que nous avait offertes Mark il y a deux ans. Là où Earth To Dora se fondait dans le cocon apaisant qu’exigeait la pandémie de coronavirus, ici Extreme Witchcraft sonne beaucoup plus rock et énervé, voire brouillon, mais au bon sens du terme. Sur Magic, binaire et carré, avec son riff très brut, Mister E donne libre cours à ses penchants glam. Good Night On Earth avance un riff simple mais efficace, agrémenté de quelques déambulations sonores. L’album nous offre quelques moments punk un peu sales comme Better Living Through Desperation et le furieux What It Isn’t (avec quelques incursions plus pop), même si le côté mélodique prime souvent comme sur la très belle I Know You’re Right qui fait une fois encore honneur aux guitares. Ailleurs, Eels met le cap sur une pop rock à la cool à l’image du sucré Strawberries & Popcorn ou encore Stumbling Bee. L’album enchaîne les titres courts et efficaces, mais la production en arrière-plan se fait souvent à grand renfort de trouvailles sonores, larsens travaillés, comme l’illustrent les premières mesures de Grandfather Clock Strikes Twelve où semble officier une sorte de sitar (qui n’en est probablement pas une). Plus loin, ce sont des sonnettes intempestives ou des sons cuivrés qui nous titillent les tympans. Seul So Anyway lève le pied, ballade bringuebalante toujours très électrique mais au tempo plus posé.
Marc Vincent