Donatella di Pietrantonio – L’âge fragile

ALBIN MICHEL 

Roman

Traduction de Laure Brignon (Italie)

Parution le 15 janvier 2025

Depuis que sa fille, étudiante à Milan, est revenue à la maison, Lucia la voit errer comme une ombre de sa chambre au canapé du salon. Elle nourrissait pourtant l’espoir qu’Amanda ne suivrait pas le même chemin qu’elle, saurait s’extraire des Abruzzes, région montagneuse au centre de l’Italie où se déroulait déjà le précédent roman de l’autrice (Borgo Sud, Albin Michel, 2023).

Donatella Di Pietrantonio - L'âge fragile - Albin Michel - Chronique dans le journal DiversionsEn ce début d’année parait la traduction française du phénomène littéraire de 2023 en Italie. Donatella Di Pietrantonio, avec L’âge fragile, a remporté le prestigieux Prix Strega, équivalent de notre Goncourt. La romancière est également lauréate du prix Strega Giovani qui s’apparente au Goncourt des Lycéens. Il faut dire que L’âge fragile parlera à différents publics. Il y est beaucoup question de filiation. Amanda, lorsqu’elle part étudier à Milan, saisit l’occasion qui n’a jamais été offerte à sa mère comme à sa grand-mère : quitter les Abruzzes et faire sa vie ailleurs. Pour Lucia et sa mère, le bout de terrain que l’on a surnommé la Dent du Loup s’apparente en effet à une prison, voire une malédiction avec le drame qui s’y est produit trente ans plus tôt. La romancière entretient dans un premier temps le mystère autour de cet événement qui a marqué la région et ses habitants. « Je n’entends plus les chants d’amour de la forêt », confie Lucia, hantée par le passé. Seule la chorale à laquelle elle prend part semble ménager une certaine harmonie dans sa vie.

L’âge fragile, c’est aussi l’histoire de la perte de l’innocence, des traumatismes qui nous assaillent en particulier à l’adolescence, quand les attaches qui nous liaient à nos parents se distendent peu à peu. « Élever Amanda a été douloureux », avoue Lucia. « Je ne la comprenais pas ». Ce combat contre le déterminisme qu’elle estime avoir perdu, sa fille peut encore le mener. « Ils étaient restés au seul endroit possible, celui où ils étaient nés. […] Ils étaient esclaves de la nécessité. Qui pesait aussi sur ma mère et moi. » Constat d’autant plus sombre que la situation faite aux femmes de la génération de Lucia est particulièrement difficile. Son père, qui aurait préféré un fils pour l’aider, exigeait de son épouse « qu’elle soit un homme aux champs et une femme à la maison ». Alors il faut fuir, ou du moins tenter. Fuir un destin tout tracé, un prédateur ou un lieu, malgré la pression de la famille ou des spéculateurs immobiliers. Combattre ce sentiment paradoxal d’être attaché corps et âme à un territoire, et comprendre pourtant que l’on n’est pas à sa place, qu’il existe autre chose ailleurs.

Paul Sobrin

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