ROCK
Jagajaguwar / 2016
En 2016, Dinosaur Jr. sort un album des années 90. Anachronisme ou nostalgie, peu importe, le résultat est un recueil de morceaux pleins de guitares, la bande-son idéale pour une sortie à la cool sur sa planche à roulettes.
Il serait prétentieux de vouloir faire la leçon à J. Mascis, Lou Barlow et Murph. Le trio ne cherche pas à se réinventer – ceci n’a d’ailleurs jamais fait partie de leur plan – et on prend un malin plaisir à les retrouver à chaque sortie, eux qui réveillent l’adolescent qui vit plus que jamais au sein des trentenaires que nous sommes devenus. Au programme, mur de son et de saturation pour dix titres aussi efficaces les uns que les autres, emballés par John Agnello qui s’y connait plutôt dans le genre (Mark Lanegan, Kurt Vile…).
Passage en revue piste par piste de Give A Glimpse Of What Yer Not.
1.Goin Down : La piste d’ouverture est un peu la façon de nous embrigader dans le successeur de I Bet On Sky, quand J. Mascis balance « Are you with me ? » sur le refrain. Dire que Goin Down est un pur morceau grunge serait un choix de facilité, mais c’est pourtant bien ce qu’il est. Riff efficace, solo cradingue ; il annonce la couleur générale de l’album.
2.Tiny : Premier single de l’album (il faut admirer le clip où le chien de J. Mascis nous montre toute sa technique sur un skate). Tiny est un morceau très pop, voir même power pop. Un rythme entrainant, presque dansant, expédié en à peine plus de 3 minutes. On se croirait dans un bon vieux teen movie écervelé à base de tourte aux pommes.
3. Be A Part : le Gandalf du rock use de son chant désabusé sur ce titre mélancolique. On pourrait y voir la version électrique d’une compo d’un des derniers albums solo de J. Mascis.
4. I Told Everyone : Un titre qui commence et se conclut autour d’un riff en boucle, la ponctuation se faisant comme à chaque fois par un solo à fond les amplis. T’écouterais pas un peu Neil Young des fois Jay ?
5. Love Is… : Lou Barlow prend le commandement sur ce titre folk pour lequel on ne peut s’empêcher de penser à Sebadoh. En même temps, qui veut-on tromper ? Love Is… (au même titre que Left/Right plus loin), est la caution Barlow du trio, histoire de rappeler qu’on n’est plus à l’époque de Where You Been, quand Mascis était le seul dinosaure à bord.
6. Good To Know : Après un interlude quasi acoustique, on revient à l’électricité expéditive comme pour bien nous rappeler que Dinosaur Jr. c’est avant tout des guitares qui jouent fort.
7. I Walk For Miles : Titre très heavy et sombre, comme si le trio était passé à la moulinette chez Alice In Chains. Le rock se fait hard, et cela se ressent dans le solo qui titille les aigües
8. Lost All Day : On va encore dire qu’on insiste sur le son si nineties de Dinosaur Jr., mais c’est pourtant le premier effet qui ressort de Lost All Day. Très pop, comme pour Tiny. Agnello fait bien son job.
9. Knock Around : Le morceau le plus intéressant de l’album. Il commence comme une ballade blues, Mascis chante très haut, la guitare est douce. Puis Murph prend le commandement pour balancer la seconde partie du titre, passant alors à un rock plus rapide qui doit beaucoup aux fûts du chauve batteur.
10. Mirror : le chant de J. Mascis se fait presque plaintif sur ce titre midtempo, dont le break de basse n’est pas sans rappeler celui de Crime In The City sur l’album Freedom de Neil Young (et au passage cela répond à la question posée plus haut).
11. Left/Right : C’est à ce badaud de Lou Barlow que revient la tâche de conclure Give A Glimpse Of What Yer Not. De nouveau c’est dans un ton plus indie, plus pausé, qui offre un petit break limite tribal made in Murph.
Après les divers projets solos et parallèles de ses membres, Dinosaur Jr. reviennent fidèles à eux-mêmes. Sans s’écarter un poil du chemin qu’ils tracent depuis 30 ans, ils offrent encore un album d’une efficacité affligeante, qui va encore permettre d’user pleinement la semelle de ses Vans.
Florian Antunes Pires