Le musée Magnin nous invite à découvrir le monde chatoyant des « Comédies, fables & arabesques » du dessinateur et graveur Claude Gillot (1673-1722), à l’occasion de cette première rétrospective française de l’artiste qui fut notamment le maître d’Antoine Watteau. Au rez-de-chaussée du musée, dans l’aile Est, sept salles accueillent différentes thématiques.
L’exposition porte la lumière sur l’œuvre peu connue de Claude Gillot, à redécouvrir au fil d’une centaine de pièces (dessins, peintures et estampes). L’artiste originaire de Langres travaillera dans de nombreux formats, mettant notamment son talent au service de l’illustration pour des almanachs, calendriers et livres. en particulier aux côtés de l’écrivain à succès Antoine Houdart de La Motte qui prendra le contrepied des Fables de La Fontaine. « On peut dire que Gillot est un vignettiste, il sait faire des petits médaillons, des petites scénettes en miniature » , explique Hélène Meyer, conservatrice générale du département des Arts graphiques du musée du Louvre, « mais ce qui est remarquable c’est aussi sa technique, ici de la plume et du lavis. »
Les arts de la scène ont été un autre sujet de prédilection pour Claude Gillot qui a produit costumes et décors pour l’opéra. « Pour cette génération d’artistes, Gillot, Watteau, Lancret, c’est une source d’inspiration extraordinaire », explique Xavier Salmon, Conservateur général du patrimoine, directeur du département des Arts graphiques au musée du Louvre, « et Gillot va être l’un des premiers à systématiquement fixer des effets de pyrotechnie, ces mises en scène étonnantes. » Une véritable émulation va se faire jour au sein du cercle d’artistes fréquentant les théâtres des foires de Saint-Germain et Saint-Laurent. Claude Gillot s’inspirera notamment des spectacles de la Comédie-Italienne pour ses Arlequinades. « Il veut montrer le caractère instantané de ces scènes », explique Hélène Meyer, « puisque jusque-là, quand on représentait des scènes de théâtre, on représentait plutôt des acteurs figés dans une attitude, souvent seuls ».
Les décors antiques auront aussi ses faveurs, pour ce qui concerne l’arabesque, que Claude Gillot va contribuer, avec d’autres, à assouplir, y apportant asymétrie et nouveau répertoire figuratif, au sein de l’atelier de son aîné Claude III Audran. Des décors qui sont aujourd’hui devenus très rares. Gillot travaillera également à des scènes de fêtes champêtres, que Watteau reprendra plus tard pour créer ses propres Fêtes galantes mais sur un mode aristocratique. Artiste de la toute fin du Grand Siècle, Claude Gillot va préfigurer la période de la Régence (1715-1723), avec sa liberté de ton (et de mœurs, comme le souligne l’exposition…). Une œuvre parodique, propice à la farce et à la satire, sans oublier le surnaturel et l’occulte. Citons la suite des Sabbats (après 1722), bénéficiant d’une technique empreinte d’« une grande vitalité, une verve, un côté extrêmement nerveux », comme l’a expliqué Hélène Meyer. « Et puis son goût de caricaturer les figures, de transformer les humains en satyres ». Au crépuscule de sa vie cependant, les ennuis de santé et d’argent s’accumulant, Claude Gillot va se tourner vers le genre sacré. On peut notamment découvrir dans l’exposition sa production de scènes religieuses, que l’on connaissait très mal jusqu’ici, à l’image du tableau (l’un des rares que l’on aie de Gillot), Le Christ dans le temps qu’il va être attaché à la croix (1715), montré dans toute sa fragilité et son humanité.
Dominique Demangeot
Claude Gillot. Comédies, fables & arabesques, Dijon, musée Magnin, du 21 mars au 23 juin
Exposition organisée par le musée national Magnin et GrandPalaisRmn, Paris, sur un projet original du musée du Louvre et avec son concours
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