Claudie Galley – Les Jardins de Torcello


Jess est guide à Venise, vivotant, faute de mieux, dans la cité lacustre, situation qu’elle estime préférable à la reprise de l’hôtel familial en France. Contrainte de quitter son appartement, la jeune femme se met en quête d’un nouveau logement et fait la connaissance de Maxence Darsène, brillant avocat domicilié dans une ancienne ferme à Torcello.

Claudie Gallay - Les jardins de Torcello - Actes Sud - Chronique dans le magazine Diversions

Torcello qui fut jadis une opulente cité, aujourd’hui dépeuplée au profit de Venise. La jeune guide y intègre une petite communauté d’âmes échouées en bout de lagune : Maxence et Colin son compagnon, Elio, homme à tout faire taiseux, la vieille Riva, mémoire de Torcello. Antoine enfin, qui vient s’immiscer entre Colin et Maxence. Ce dernier a pour projet de redonner vie aux jardins de Torcello et à ses vignes, retrouver le vin bu jadis par les doges. Tout un écosystème à recréer, potager, plantes médicinales… Restaurer une harmonie mise à mal par les caprices des eaux et des hommes. Et si l’île est un cocon hors du temps, remède à notre époque où tout va trop vite comme dans une série Netflix, ses personnages n’en sont pas moins en équilibre instable, guettés par la menace sourde de leurs passés et de leurs relations.

Les Jardins de Torcello est aussi un hymne charnel à la beauté du monde (« la terre sent fort »). Heureusement les marécages sont (encore) là pour protéger Torcello, et ses rares habitants ne ménagent pas leurs efforts pour planter, construire un mur, gagner un peu de temps et de terre sur la lagune. Chaque personnage compose avec ses démons: deuils, violence, couple compliqué et passifs familiaux, mais la nature est ainsi faite : de la simple limace à un brillant avocat (en passant par deux furettes), tout le monde se bat pour continuer à avancer. L’âme humaine a ses passions tristes (Jess en trouve plusieurs exemples lorsqu’elle classe les dossiers de l’avocat pénaliste), mais un acquittement est peut-être toujours envisageable, que l’on soit prédateurs ou proies. En ménageant, à l’instar de Maxence Darsène, « un équilibre, entre romantisme et désespoir », Claudie Gallay n’oublie pas une Venise envoûtante, dont elle fait surgir canaux et ruelles. Loin des clichés touristiques elle révèle une cité plus sombre, et en particulier ses palais comme le Ca’Dario à la réputation sulfureuse.

Dominique Demangeot

Retrouvez Claudie Gallay à l’édition 2024 de Livres dans la Boucle

Livres dans la Boucle 2024 dans le Grand Besançon

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