Cirque et Fanfares 2018 – Rencontre avec Sergent Garcia

Parmi les quarante-huit concerts de Cirque et Fanfares à Dole, Sergent Garcia occupera la scène pour fêter vingt ans de carrière solo le 19 mai 2018. A ses côtés le temps de quelques morceaux, l’artiste a invité Ramses, vétéran du reggae français connu dans les années 90 avec son groupe Saï Saï. Sergent Garcia et Ramses se sont rencontrés il y a six mois pour faire un titre ensemble. Nous avons interrogé Bruno, alias Sergent Garcia.

Diversions : Vingt années de Sergent Garcia signifient 20 ans de salsamuffin ?
Sergent Garcia : Oui, Au moins, vingt ans de salsamuffin : ce sont vingt années de scène. Avant il y a eu un travail sur trois ou quatre ans pour arriver à ce concept. Je ne me suis pas réveillé un matin en me disant « tiens, je vais faire de la salsamuffin ». D’abord, dans les années 90 je faisais du raggamuffin en espagnol au sein du Bawawa Sound System. À un moment j’ai pensé qu’il serait intéressant de faire un disque sur ça. Mais pas sur de la musique jamaïcaine, car on avait tout un continent latino-américain. A partir de là j’ai commencé à créer des morceaux en pensant à un pont entre la Jamaïque et Cuba. Cela fait vingt ans que je traîne la salsamuffin sur les routes. Même entre salsa et raggamuffin. Plus les années que j’ai passées à sillonner les Amériques latines. Depuis, j’ai rajouté d’autres éléments comme la cumbia, le merengue, ou d’autres styles issus de la région.

Sergent Garcia à Dole à Cirque et Fanfares 2018

Sergent Garcia – Photo : DR

Cases-tu un bout d’Amérique latine par morceau, ou mélanges-tu des influences dans les chansons ?
Ca dépend. Certains titres sont vraiment salsa, d’autres vraiment reggae, voire certains proviennent de recherches qui peuvent paraître quasi improbables au départ, et dont finalement, dans le laboratoire des studios, un rendu sort d’un coup. Ca peut être des éléments enregistrés d’une partie à Cuba, mélangés à des sons avec des percussionnistes colombiens ou des cuivres mexicains. Alors il est vrai que parfois je passe d’un pays à l’autre, et je m’inspire ou travaille avec des musiciens ici et là.

Tu définis la salsamuffin comme un concept. Est-ce un concept inépuisable ? N’y aura-t-il pas à un moment besoin de le renouveler malgré une matière qui se nourrit d’elle-même ?
Toute la musique fonctionne ainsi. Les nouveaux genres ne surviennent jamais au gré du hasard. C’est souvent le résultat de rencontres de cultures différentes, de rythmes différents, de personnes différentes. Il y a beaucoup de fois ou la musique est arrivée grâce aux bateaux et aux ports. Parfois elle est arrivée avec une histoire désastreuse comme celle de l’esclavage. À des déplacements de millions d’Africains qu’on a emmenés en Amérique. Tout ça fait que les rythmes s’entremêlent, que les morceaux existent. Il y a toujours une continuité. La musique est le résultat des événements sociaux et géopolitiques du monde. Si aujourd’hui on accueillait les Syriens qui sont en fuite de leur pays, certainement dans quelques années on aurait des influences de musiques syriennes dans des styles français. C’est ça qui fait la richesse de nos cultures. Cela revient à pouvoir se mélanger et se réinventer à chaque fois.

a-quiEn écoutant À qui profite le crime ?, ton single inédit, ça m’a fait penser à un morceau de Manu Chao. -il quelque peu salsamuffin lui aussi d’après toi ?
Oui sauf que lui n’est pas trop salsa. Si l’on analyse sa façon de composer il va dans des registres plutôt brésilo-colombiens et sur des rythmes qui se rapprochent de la ballade, qui sont moins cubains que chez moi. Ceci dit nous sommes un peu cousins de parcours : nous sommes tous deux fils d’Espagnols immigrés, lui a débuté avec la Mano Negra et moi avec Ludwig Von 88, nous avons l’un comme l’autre tourné en Amérique latine. Il y a aussi nos prises de positions politiques.

Cirque et Fanfares 2018 à DoleTu as de nombreux titres évidemment en espagnol et en anglais. Cependant tu places aussi du français dans tes chansons.
Oui il y en a eu sur tous les albums et un peu plus sur le dernier en date. Je ne fais pas attention en quelle langue j’écris. Ce sont les morceaux qui me dictent une langue ou une autre. Après j’aime bien l’espagnol pour son caractère très rythmique et très agréable à poser sur le type de rythmes que je propose. Quant au français, j’adore pour ce qu’il a de nuances. Ca apporte d’autres attraits.

On dirait que tu assembles davantage la langue française au reggae…
Peut-être suis-je plus à l’aise pour chanter du reggae en français que de la salsa dans cette langue. En même temps, sur la chanson A qui profite le crime, derrière le reggae c’est de la cumbia (colombienne) ! Les clarinettes qu’on entend sont des clarinettes de cumbia. Pareil pour les percussions. Donc on est dans une salsamuffin. Par exemple sur le titre Personne ne me stoppe, là on pourrait dire que c’est de la « coumbiamuffin ».

Tu dis que ce sont les textes qui emmènent la langue utilisée : est-ce vraiment aussi simple que cela ? Est-ce à dire que tu penses à quelque chose qui vient de façon aléatoire dans une langue ?
Oui. C’est-à-dire que je ne m’apprête pas à faire une chanson par exemple en français. J’écoute un instrumental que je viens de créer, et puis je le laisse courir. Ensuite je chantonne, j’improvise dessus. Comme si j’entendais une musique et que je chantonnais « n’importe quoi ». De là, je vois ce qui vient. Si j’ai un chœur en français, alors je me dis que c’est une bonne idée de chanson. Puis je développe comme quand on est à l’école et qu’on nous dit : « développez monsieur, développez » (Sourire).

Propos recueillis par Fred Dassonville

Cirque et Fanfares, Dole, divers lieux, 19 et 20 mai 2018
Sergent Garcia sera en concert le samedi 19 mai à 20h30, Place Nationale

Programme complet : www.cirqueetfanfaresadole.com

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