Parallèlement à l’exposition consacrée aux photographies sur le Liban de Stéphane Lagoutte, le Musée Nicéphore Niépce présente également les travaux récents de Baptiste Rabichon. Une recherche où le processus de création, atypique, dit aussi beaucoup de l’intention de l’artiste qui façonne ses propres mondes, voyage à New York ou dans des univers virtuels, jusqu’au cosmos. Pour cela il recourt à des moyens divers, de l’argentique au numérique, en passant par le dessin, la chambre photographique…
L’exposition permet d’explorer les différents mondes de Baptiste Rabichon, qui nous emporte notamment dans l’espace avec Vues d’artiste (2022), créant des astres de manière très artisanale en ayant recours aux photogrammes et aux dessins. Il faut dire que l’artiste aime à créer des mondes fictifs, comme avec Pièces (2023) qui donne son titre à l’exposition ou encore Manhattan Papers (2021), série dans laquelle il nous donnait à voir la ville de New York recomposée par ses soins. Des dizaines de photographies en couleurs négatives ont été tout d’abord assemblées pour former de petites maquettes, décors inspirés de ce que l’artiste a pu contempler dans la Grosse Pomme. Ces maquettes sont ensuite rephotographiées en studio sur film positif couleur. Un papier négatif couleur accueille enfin les tirages, pour aboutir à des images chimères, hybrides positif/négatif. Avec ces paysages urbains new-yorkais, le photographe tisse des références à des films comme Metropolis. C’est également à partir de souvenirs que Baptiste Rabichon travaille avec sa série Lost Levels (2020-2021, initiée lors du confinement), mais en rendant hommage cette fois aux jeux vidéo de son enfance (l’artiste est né en 1987). Le souvenir tient également une place importante dans son travail, qu’il recycle et réinjecte dans ses créations. À partir de jeux datant de l’époque des 8 et 16 bits (autant dire la préhistoire au vu des capacités du gaming actuel), Baptiste Rabichon élabore des tableaux, les niveaux d’un jeu vidéo original, conçu à partir d’images réelles de jeux. On peut même croiser le photographe qui s’est inclus dans ses scènes. On reste dans l’univers de l’informatique avec Blue Screen of Death (2021-2022), en référence au redouté écran bleu qui n’est jamais une bonne nouvelle pour votre ordinateur. Avec ses photogrammes à double exposition, « celle de l’agrandisseur imprimant l’ombre des objets cachant sa lumière et celle du téléphone s’exposant lui-même par contact direct », Baptiste Rabichon veut signifier l’omniprésence des écrans (et de l’information/divertissement en boucle) dans nos vies modernes. Mais l’artiste illustre aussi notre époque particulière, de transition, entre la supériorité écrasante du numérique, et l’argentique encore présent mais qui s’inscrit davantage dans une optique artistique. Ainsi dans la série Verbatim, Baptiste Rabichon transpose sur papier photosensible, via un agrandisseur, des photos prises sur smartphone, faisant se rencontrer les deux technologies.– Paul Sobrin –
Baptiste Rabichon, Pièces, Chalon-sur-Saône, Musée Nicéphore Niépce, du 14 octobre au 21 janvier
museeniepce.com