Le sculpteur animalier Mauro Corda était hier à la Citadelle de Besançon à l’occasion du vernissage de son exposition Zoospective – Le règne animal. L’artiste répond aux questions de Diversions sur l’événement à apprécier en intérieur et en extérieur, et qui s’inscrit dans le cadre de la célébration des dix ans de l’inscription du Réseau Vauban sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Retrouvez prochainement sur la page Facebook de Diversions un reportage vidéo de l’exposition.
« Depuis plus d’une trentaine d’années, Mauro Corda interroge les limites du corps, le transhumanisme, les corps augmentés chez l’homme, mais aussi la figure animale », souligne Aurélie Carré, conservatrice du Museum et du Musée Comtois à la Citadelle. « Nous avons plus d’une soixantaine d’installations et d’œuvres dans l’exposition, qui vont retracer le parcours artistique de Mauro Corda, d’un début de carrière plutôt marqué par les pièces d’inspiration antique, jusqu’à des pièces qui évoquent des questionnements beaucoup plus contemporains sur les manipulations génétiques, la bioéthique, le rapport de l’humain à l’animal ». À noter qu’une dizaine d’ateliers animés par une artiste peintre plasticienne, Emilie Muzy, inviteront les enfants à fabriquer des masques hybrides à partir de matériaux de recyclage.
D’où est venue l’idée de cette exposition à voir à la Citadelle de Besançon jusqu’au 15 juillet ?
L’idée de l’exposition est venue d’un souhait du maire de Besançon et du conservateur précédent, de relater l’histoire du zoo de la Citadelle. C’est une exposition sur la sculpture animalière, et je pense que le mariage des deux : les 10 ans de l’inscription du Réseau Vauban sur la liste UNESCO et l’histoire du zoo… tombaient à pic !
Dans quelle filiation artistique pourrait-on situer votre travail ?
Je suis sculpteur figuratif dans une tradition de sculpture française. J’ai étudié ici, mon nom est italien mais j’ai surtout travaillé dans l’optique de la sculpture française. La sculpture figurative aujourd’hui revit. Il y avait une période où tout le monde faisait de l’abstrait.
Les animaux que vous créez sont souvent des chimères, des créatures fantastiques.
Oui à l’intérieur de ça, il y a pas mal de rêves. Vous avez une hyène, vous avez une tortue. Ces deux animaux sont à l’opposé : l’un est aquatique et l’autre non, l’un est féroce et l’autre non, mais j’ai essayé de marier la tortue avec un requin, qui est d’ailleurs souvent mangée par les requins. On a ce côté tortue féroce. La hyène je l’ai mise avec un porc-épic mais ça c’est à découvrir… il ne faut pas tout montrer ! Il faut que les gens rentrent dans l’exposition. Aurélie Carré a fait un travail exceptionnel.
Zoospective – Le règne animal comporte également une dimension de parcours.
On déambule dans un labyrinthe où l’on va de découvertes en découvertes. C’est ce qui m’a vraiment plu. C’est une exposition qui me séduit vraiment et je la regarde avec émotion et franchement, si toutes les villes accueillaient les artistes comme vous m’accueillez ici à Besançon, ils feraient la queue pour venir.
L’une des thématiques centrales dans votre travail est la génétique. Qu’est-ce qui vous attire dans cette notion ?
Quand on travaille sur la génétique, on peut marier tout ce qu’on veut. La plupart des animaux de ferme, d’élevage ont été recréés par l’homme. Moi c’est un petit peu une continuité de la génétique, et là je m’amuse, mais il y a quand même souvent des assimilations avec une panthère et une gazelle : l’une mange l’autre. C’est un travail de plusieurs années et comme je le dis toujours : l’inspiration vient à l’atelier !
Vous êtes également attaché à la matière.
Si les personnes regardent ces pièces il faut aussi regarder la texture : le modelé, la délicatesse du dessin. C’est vraiment l’écriture de l’artiste et de l’art avec cette tradition : une rigueur sur le dessin et une rigueur sur le modelage, et ensuite une rigueur sur les matériaux entourés de fondeurs d’excellence, des gens très qualifiés. On est une trentaine de personnes à travailler autour d’une exposition comme celle-ci. C’est une petite entreprise. Il y a aussi le travail du métal qui est dans la grande tradition de la sculpture. Le bronze est quelque chose de noble et on ne fait pas une sculpture en bronze comme ça. Il y a un coût et le métal est précieux. Le travail de l’homme sur ça est aussi très précieux parce que c’est un savoir-faire : le modelage, le moulage, la fonderie, la patine. Tout ça c’est une chaîne et après vous avez celui qui installe l’exposition, qui met les choses en valeur.
Allez-vous revenir à Besançon prochainement ?
Quand vous exposez vos œuvres, vous les mettez un peu comme un mannequin sur une estrade. Elles défilent. C’est leur défilé, alors je suis assez content ! Je viens de voir le défilé mais par contre elles ont leur propre vie. Comme pour chaque exposition, je viens à l’inauguration et après on ne me voit plus du tout, parce que mon travail est fini. C’est à elles de faire le leur !
Propos recueillis par Caroline Vo Minh
Exposition Mauro Corda – Zoospective, le règne animal, Citadelle de Besançon, du 1er avril au 15 juillet
www.citadelle.com