ÉDITIONS DU ROCHER
Essai
Voilà une thématique qui risque bien de prendre une place grandissante dans le débat public au cours des prochaines années. La crise sanitaire, toujours en cours, n’a fait que renforcer les aspirations à davantage de vert, davantage d’air et d’espace. Les conditions semblent donc réunies pour que la France des « oubliés » se réveille. Occultée depuis plusieurs décennies par les différents pouvoirs en place, la campagne, si elle a perdu du terrain face aux zones urbaines, n’en reste pas moins un lieu où des « actes concrets » sont effectués quotidiennement. Un état des lieux, nécessaire, qu’opère Anthony Cortes dans Le réveil de la France oubliée.
En Dorgogne, en Bretagne ou en Alsace, dans le Lot ou dans la Creuse, l’Ardèche ou l’Hérault, Anthony Cortes s’est livré à une enquête minutieuse sur les différents projets menés par les ruraux ou « néo-ruraux » pour redynamiser leurs territoires. Face à l’abandon de l’État, à travers notamment un détricotage des services publics et la baisse constante des dotations, le salut ne semble pouvoir venir que de la campagne elle-même. Le réveil de la France oubliée bruisse de noms de villages inconnus, mais qui portent des projets tout à fait concrets. L’auteur y aborde différentes thématiques centrales telles que l’éducation, la santé et le commerce, des bases sur lesquelles reconstruire. Anthony Cortes dresse une cartographie précise des zones rurales aujourd’hui, l’un des grands enjeux semblant être de réfléchir à la manière de reconnecter les urbains à la campagne et mettre fin à cette « course du plus, au profit d’une marche vers le mieux », Anthony Cortez citant ici Edgar Morin.
Et si les villages, leur mode de vie comme leurs valeurs, constituaient un avenir. Pas n’importe lequel : un avenir viable. Et, par ailleurs, une certaine idée, positive, de la modernité ? »
Cet intérêt grandissant pour les circuits courts concerne les produits mais aussi… les décisions, Anthony Cortes traitant également du mouvement des Gilets Jaunes qui militaient notamment pour davantage de démocratie participative et locale. Pourtant le « pacte girondin » promis par Emmanuel Macron semble avoir du plomb dans l’aile, et plusieurs défis de taille attendent les ruraux dans les prochaines années. Il semble ainsi que le chacun pour soi urbain affecte également les campagnes, et que les nouveaux arrivants importent leurs habitudes de vie sans nécessairement se mêler aux habitants du cru. Si tout n’est pas rose – on apprend, au détour d’une note de bas de page, que dès la fin de la seconde guerre mondiale, Jean-François Gravier évoque un « désert français » en parlant des campagnes -, Anthony Cortes analyse de manière précise les tenants et les aboutissants du problème. Face à une population certes vieillissante voire âgée, les problèmes économiques et la désertification, de nombreux foyers d’engagement (d’embrasement ?) sont pourtant bien présents. Le web peut aider à fédérer les initiatives et les bonnes volontés, pour jeter les bases, comme le dit l’un des habitants interviewés, des « valeurs du monde de demain. »