Pour sa première pièce programmée en tant que directeur du CDN Besançon Franche-Comté, qui retrouve son ancien nom de Nouveau Théâtre, Tommy Milliot proposera l’une de ses dernières créations, L’arbre à sang, adaptation d’un texte de l’auteur australien Angus Cerini. Huis-clos où une mère et ses deux filles viennent d’assassiner leur bourreau de mari et père.
L’arbre à sang – Photo : Pierre Gondard
Le choix de cette pièce, pour présenter son univers au public franc-comtois, s’inscrit dans la volonté du nouveau directeur de poursuivre l’esprit de décentralisation propre aux centres dramatiques nationaux. L’arbre à sang sera en effet donné dans le cadre du nouveau dispositif Ici & Là, initié par Tommy Milliot afin de proposer des pièces hors des théâtres en Franche-Comté (en intérieur comme en extérieur). Un premier geste dirigé « vers les publics, les territoires », annonce-t-il encore. Une version itinérante de L’arbre à sang avait déjà été élaborée en 2023 au sein de sa compagnie Man Haast. « J’ai beaucoup travaillé sur des auteurs et des autrices singuliers, pas encore forcément montés en France », explique Tommy Milliot. « Angus Cerini est un auteur australien qui parle des violences domestiques, un sujet important qui traverse aussi la saison du Nouveau Théâtre. » D’autres pièces vont aborder cette thématique des violences
faites aux femmes ou d’une certaine domination masculine à l’image du Petit Chaperon rouge en décembre, Taire en janvier ou encore Une maison de poupée en mars, « l’histoire d’une poupée qui dit non et fracasse le patriarcat », peut-on lire dans la plaquette de saison.
La pièce, qui sera recréée en version salle à la saison 2025-26 sur le plateau du Nouveau Théâtre, a pour lieu une ferme perdue au milieu de l’Australie, et place les trois femmes dans une solitude abyssale, face à leur destinée… face au public, « sans séparation entre la scène et la salle, un arc de cercle comme une agora », précise Tommy Milliot. Battues, violées, M’man, Ada et Ida ont accompli leur vengeance et racontent comment elles ont réussi à échapper à la justice en dissimulant le corps. « C’est comme dans un thriller, on traverse avec elles la peur d’être pris par la police », explique le metteur en scène, « elles rejouent devant nous tout ce qui s’est passé, les personnages et les situations qui sont parfois extrêmement cocasses ! » En effet, à en croire le metteur en scène, la pièce n’est pas dénuée d’humour noir ! « C’est une pièce marquante que j’ai voulu monter justement parce qu’elle prenait la question de la violence faite aux femmes sous un autre angle. »
Photo : Pierre Gondard
Tommy Milliot confronte le public avec la vérité nue de l’acte perpétré par les trois femmes. Décor et éclairage épurés laissent toute sa place au texte (écrit rapidement par son auteur, d’où ce sentiment d’urgence), une partition rugueuse et syncopée, bien loin de la pièce de Sénèque dépeignant le sort de Médée. Une histoire de vengeance, déjà, que Tommy Milliot mettait en scène en 2021. C’est Dominique Hollier (interprétant la mère dans la pièce), qui a offert au texte d’Angus Cerini sa première traduction française. « Essayer de dire quelque chose que quelqu’un dit dans une langue étrangère, ça nous oblige à nous déplacer », ajoute Tommy Milliot. Quitter le bush australien anglophone pour faire résonner cette tragédie du quotidien dans notre langue et nos contrées françaises. Manière de se décentrer là encore.
– Dominique Demangeot –
L’arbre à sang, en itinérance : Pesmes, 22 novembre à 20h30, Pirey, 23 novembre à 18h, Pierrefontaine-les-Varans, 24 novembre à 17h – Deux autres tournées auront lieu sur la Franche-Comté en février et juin
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