En ce début d’année, le Munstrum Théâtre présentera au Théâtre Dijon Bourgogne sa création Zypher Z. Après Les Possédés d’Illfurth programmé l’an dernier au festival Théâtre en Mai, la compagnie est de retour pour nous transporter cette fois dans une autre version de notre monde, une « société de la post-hybridation » qui évoque (et remet en cause) la place de l’homme dans l’univers. Le texte de la pièce a été co-écrit par Louis Arene et Kevin Keiss, auteur associé au nouveau projet de direction de Maëlle Poésy.
Zypher est l’un des derniers humains. Il est marié à un ficus avec lequel il communique via un télétranscripteur greffé sur ses racines… Dans le futur qu’imagine le Munstrum Théâtre, les animaux parlent et des robots s’acquittent des tâches quotidiennes. Au vu des avancées technologiques et de son poste dans une société performante, tout pourrait se passer dans le meilleur des mondes, si Zypher ne sentait pas une douleur grandissante dans son épaule gauche, un bubon qui ne cesse de grossir. Peu à peu, il prend conscience qu’un être difforme et doué de conscience croît en lui et finit par se détacher pour mener sa propre existence, devenant un double maléfique de Zypher, plus dissipé, plus violent, peut-être aussi plus libre.
Le texte de Kevin Keiss évoque la question du double. « Engendrer un autre soi, c’est abolir la solitude intrinsèque de chaque existence », explique le dramaturge. « L’apparition de son double, c’est la matérialisation des puissances troublantes et paradoxales de l’inconscient, du refoulé. De l’innommé. Le double est similaire en apparence mais il est capable de dire ce que l’on taisait. De briser les interdits. » Dans la dystopie imaginée par le Munstrum Théâtre, l’étrangeté est de rigueur, et le parti-pris esthétique toujours aussi radical, comme le propos. L’homme n’a plus sa place tout en haut du règne du vivant. Ainsi le patron de Zypher n’est autre qu’un éléphant qui marche sur deux pattes comme les bipèdes communément appelés hommes. « Les préoccupations qui agitent les artistes que nous sommes peinent à trouver un écho dans les œuvres du passé », explique la compagnie. « La prédation mortifère de l’homme sur le reste du vivant préfigure un effondrement systémique sans précédent. » On retrouve les masques propres au Munstrum Théâtre, que Louis Arene, également comédien et metteur en scène, crée lui-même. « Une fine double peau modifie les visages des acteurs et révèle des créatures étranges qui nous relient à notre humanité profonde », explique-t-il. Grâce à Carole Allemand, des sculptures à mi-chemin entre l’homme et l’animal verront le jour, mais aussi robots, marionnettes et dispositifs scéniques divers. Un travail a également été effectué par le chorégraphe Yotam Peled, « pour trouver la corporalité singulière des êtres que nous inventerons et composer les tableaux chorégraphiques qui jalonneront le spectacle », souligne encore Louis Arene qui a également fait appel à deux circassiens-acrobates pour interpréter certains robots et animaux, histoire de repousser encore davantage les limites de la réalité et du corps.
Marc Vincent
Zypher Z., Théâtre Dijon Bourgogne, du 24 au 28 janvier
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C’est autour de Zypher Z. que se dérouleront fin janvier les Lycéades 2023 (plus d’infos ci-dessous lors du stage préparatoire d’octobre dernier).