Caroline Guiela Nguyen, qui arrivera à la direction du TNS en septembre prochain, présente début 2023 à Strasbourg sa dernière création, dont le postulat est la disparition de la moitié de l’humanité après une éclipse solaire. Dans les « Centres de Soin et de Consolation », qui ont ouvert partout dans le monde après la catastrophe, des êtres esseulés se retrouvent pour faire groupe et surtout tenter de retrouver leurs disparus.
Avec ce « conte fantastique », la cie Les Hommes Approximatifs propose un texte original de Caroline Guiela Nguyen et l’équipe artistique, faisant partie du cycle de créations « FRATERNITÉ ». Une thématique qui s’est vue éclairée et nourrie par la rencontre de plusieurs institutions, associations comme le Bureau du Rétablissement des Liens Familiaux (BRLF) de la Croix-Rouge française. « C’est ainsi que la fraternité nous est apparue », expliquait en 2021 Caroline Guiela Nguyen à Francis Cossu, à l’occasion du 75e Festival d’Avignon, « comme un élan qui lance un regard depuis le présent, vers le passé et vers l’avenir. » Ici c’est donc l’avenir qui est fantasmé, un futur où la moitié de l’humanité disparait. La première œuvre du cycle avait pris la forme d’un court-métrage tourné en compagnie de détenus de la Centrale d’Arles en 2020. « Le point de départ du film vient de ce que m’a raconté un détenu après avoir revu sa fille », explique Caroline, « qu’il avait quittée enfant et retrouvait, quatre ans plus tard au parloir, jeune femme. » La compagnie a travaillé dans la prison autour du temps qui passe, perception nécessairement différente lorsque l’on se trouve en détention. Les Engloutis nous présentait des personnages retournant chez eux après cinquante ans d’absence.
« FRATERNITÉ, Conte fantastique pose cette fois-ci la question du temps sous l’angle de ceux qui attendent et non plus de ceux qui reviennent », explique la metteuse en scène qui nous propose de suivre ces derniers au fil des décennies, tentant de combler leurs vides. Le Centre de Soin et de Consolation de la pièce s’inspire de structures sociales visitées par la compagnie et de leurs usagers, qui « ont besoin d’aide pour trouver des réponses aux événements qu’ils traversent. » Pour interpréter ces usagers mais aussi celles et ceux qui les accueillent, Caroline Guiela Nguyen a rassemblé au plateau professionnels et amateurs, d’origines, de langues et de générations diverses pour évoquer la fraternité, qui « s’incarne à travers le parcours de personnages qui cherchent à construire un avenir commun avec leurs invisibles. Ils traduisent l’étendue du sens symbolique et concret du mot fraternité. »
Marc Vincent
FRATERNITÉ, Conte fantastique, Théâtre National de Strasbourg, du 12 au 20 janvier
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