Lorsqu’il apprend la mort de sa sœur, Jean rentre d’Afrique et retrouve la ferme familiale. Il retourne dans le village de son enfance et renoue avec ses racines, un milieu que le producteur de musique a abandonné « avec un certain mépris », explique le metteur en scène du Cinématique Théâtre, Christophe Vincent.
Les relations de Jean avec sa famille ne sont pas au beau fixe en effet, un retour qui « ravive des tensions avec son autre sœur, avec le mari de sa sœur, son ex… », explique encore le metteur en scène. Pas de célébration de pré-mariage comme pourrait le laisser entendre le titre de la pièce, mais un enterrement dans les règles de l’art. C’est Gilles Granouillet qui a proposé le texte à Christophe Vincent, qui venait de perdre sa propre sœur. Jean revit cette journée de l’enterrement juste avant de mourir. « Ce à quoi nous assistons finalement n’est qu’un souvenir marquant de ce personnage, comme s’il s’agissait du dernier effort de sa pensée avant de tomber lui-même dans ‘’la fosse de l’oubli’’», peut-on lire dans l’argumentaire de la pièce. Vidéo et son spatialisé matérialisent ces plongées dans les souvenirs, où l’on retrouve aussi la sœur disparue.
Si l’action principale se passe au milieu des années 80, les époques se croisent, « ces journées aux contours floutés comme la mémoire peut l’être », dit encore Christophe Vincent. Les musiques de Bob Dylan, Patti Smith et Neil Young contribuent à cette atmosphère propice à l’introspection. On peut aussi entendre les Sex Pistols qui interviennent pour hausser le tempo, car les souvenirs de Jean se teintent également de rancœur et de colère, dans cette pièce où les non-dits ressurgissent comme cela peut parfois arriver dans les réunions de famille. « Tout se dit dans ce moment si particulier, tout se lâche enfin. Il peut arrêter cette journée, il peut la reprendre, cela met encore plus en exergue les choses. » Jean navigue dans le temps, et brise parfois le quatrième mur en prenant à parti le public. Enterrement d’une vie de jeune fille chronique également une époque en particulier, un temps de basculement « où les valeurs soixante-huitardes sont progressivement délaissées, au profit d’un nouvel Eldorado: la mondialisation. Où les territoires ruraux sont progressivement abandonnés pour les milieux urbains ».
Marc Vincent
Enterrement d’une vie de jeune fille, Lons-le-Saunier, Le Théâtre (Scènes du Jura), 2 février 2023 à 20h30
https://www.scenesdujura.com/enterrement-d-une-vie-de-jeune-fille-theatre-gilles-granouillet-christophe-vincent,spectacle-290.htm
Reportage tourné lors de la création au Théâtre Edwige Feuillère de Vesoul