Cet été, le Musée Courbet d’Ornans aborde la figure du paysan, dans l’œuvre du peintre franc-comtois mais aussi en étudiant les tableaux et sculptures d’autres artistes qui ont eu à cœur de décrire le monde rural au XIXe siècle. Plus de 80 œuvres d’artistes nationaux et internationaux seront exposées, peintres, sculpteurs, photographes, écrivains, afin de rendre compte de cet intérêt pour l’univers agricole, dans le Doubs et ailleurs en France et en Europe.
C’est à partir du XIXe siècle que le thème de la paysannerie devient central, avec l’apparition du réalisme. « Gustave Courbet a été l’un des grands rénovateurs de la représentation paysanne au XIXe siècle », explique Benjamin Foudral, conservateur-directeur du musée et pôle Courbet. « Il a même impulsé un véritable phénomène à l’échelle nationale et européenne avec son contemporain direct, Jean-François Millet. » L’exposition accueille quelques chefs d’œuvre des deux artistes issus du monde rural comme Les paysans de Flagey de Courbet et Un Vanneur de Millet. On trouvera aussi La Méridienne de Van Gogh, « peut-être le chef d’œuvre de Van Gogh, qui normalement ne bouge pas du tout du Musée d’Orsay, et notre partenaire nous fait l’honneur de nous prêter ce tableau. » On pourra aussi admirer une esquisse des Cribleuses de blé, issue d’une collection privée de Hong-Kong. L’exposition explore ce phénomène culturel du milieu à la fin du XIXe siècle à travers de grands noms comme Jules Breton, au réalisme rural plus académique, Bastien-Lepage, Paul Gauguin, Auguste Rodin, Honoré de Balzac, Émile Zola, ainsi que des artistes aujourd’hui oubliés mais très appréciés des amateurs de l’époque comme le sculpteur Alfred Boucher ou le peintre Eugène Burnand. « Ce que l’on remarque, c’est que chaque artiste a des intentions très diverses derrière cette même représentation paysanne », ajoute Benjamin Foudral.
L’exposition retracera quelques innovations picturales, à l’image de Van Gogh influencé par le travail de Jean-François Millet, et qui va tenter de traduire « dans une nouvelle langue », comme il le dit lui-même, la peinture de ce dernier. « Pour d’autres, ce seront des intentions spiritualistes et symboliques », explique Benjamin Foudral. On pourra ainsi découvrir quelques travaux de l’École de Pont-Aven et de Paul Gauguin notamment, « à la recherche du primitif chez les paysans bretons ». Certains artistes vont porter un message politique fort, d’émancipation pour la classe populaire de la paysannerie. Ainsi les sculpteurs Jules Dalou et Constantin Meunier placent le paysan au centre de leurs monuments publics dédiés aux travailleurs (avec l’image symbolique du semeur). « C’est une thématique fondamentale pour le XIXe siècle puisque c’est vraiment l’irruption d’un nouveau peuple, une classe sociale qui était totalement invisible du monde de l’art jusqu’à Courbet et Millet. » Des œuvres venues notamment d’Angleterre et de Hongrie vont montrer que ce message sera amplement diffusé hors de nos frontières. L’exposition nous permet également de faire un lien avec l’époque moderne et la situation des agriculteurs aujourd’hui qui connaissent, comme au temps de Courbet, de profondes mutations sociales et technologiques.
– Dominique Demangeot –
Ceux de la terre. La figure du paysan de Courbet à Van Gogh, Ornans, Musée Courbet, du 27 juin au 16 octobre
www.musee-courbet.fr