Back To The Trees 2022 – Gilles Malatray

Gilles Malatray arpente depuis trente ans les paysages sonores, s’inspirant notamment de l’écologie sonore théorisée par Raymond Murray Schafer dans les années 50. Après avoir proposé lors des deux dernières éditions du festival des duos performatifs, cette fois Gilles revient à Back To The Trees en solo et nous propose une installation dans les bois à base de mini haut-parleurs.

Back To The Trees 2022 dans le Bois d'Ambre à Saint-VitOù as-tu décidé d’installer tes haut-parleurs le 25 juin prochain ? 
Ce sera dans une clairière qu’a dû me dégotter Lionel (Lionel Viard, organisateur de Back To The Trees et grand dégotteur de clairières, NDLR). C’est un travail que j’avais commencé autour des oiseaux et que j’ai complètement remanié pour la circonstance. Ca s’appelle Déchanter en oiseaux. C’est un clin d’œil à Vinciane Despret et à son bouquin Habiter en oiseau.

De quoi nous parle cette nouvelle installation ?
Je suis reparti sur une fable écologique pas très rigolote où les oiseaux ont muté et ça donne des chants un peu bizarres. J’ai appelé ça les « pie-romanes », les « canari-bous »…

Ce sont donc des hybrides, des chimères ?
Oui c’est le principe de partir sur des mutations, des OGM d’oiseaux !

Quelle a été la base sonore pour ce travail ?
Ce sont des vrais chants d’oiseaux qui ont été pris ici et là et que j’ai modifiés. Je l’avais fait pour une raison pratique car la première installation de ces oiseaux s’était faite en forêt. J’avais vu avec Bernard Faure, un ornithologue, de façon à ne pas les déranger, pour qu’ils ne confondent pas les vrais cris d’oiseaux avec des faux. Apparemment ils se sont posés tout de suite dessus, donc je ne les ai pas dérangés ! Si on met sans le vouloir des cris d’alerte ou de territoire et s’il y a des nidifications en été, on peut les perturber.

Et puis peut-être que des vrais chants d’oiseaux vont venir se mêler à tes créations ?
Ah et bien ça c’est l’idéal, qu’il y ait du vrai et du faux ! J’avais fait ça il y a quelques années à Back To The Trees mais avec des brames de cerfs, quand ça se déroulait encore dans la Forêt de Chaux.

La nature revient-elle souvent dans ton travail sonore ?
J’ai une partie très urbaine, et une partie plutôt espaces naturels, forêts en tous cas. C’est vrai que la question de savoir ce qui sature en ville d’un côté, et ce qui se paupérise et disparait d’un autre en forêt, ça me pose la question de l’écologie sonore. Pour beaucoup d’audio-naturalistes, les oiseaux c’est un marqueur de ce qui disparait.

Ton travail s’inspire de l’œuvre du musicien canadien Murray Schafer. Comment définirais-tu le principe d’écologie sonore ?
C’est apprendre à écouter, pour sensibiliser, protéger les espaces qui peuvent l’être, améliorer ce qui peut l’être. C’est une partie de l’écologie. C’est montrer qu’il y a des zones qui fonctionnent très bien, en ville ou en campagne, et d’autres très mal. Une grande plaine céréalière de la Bourgogne, c’est un lieu catastrophique pour l’écoute et pour l’écologie, parce qu’il n’y a plus rien que des tracteurs. Il n’y a plus d’eau, plus de forêts, de haies, plus d’oiseaux… C’est aussi repenser les aménagements urbains. Pourquoi mettre des murs anti-bruit dans des villes, ça ne sert pas à grand-chose, mais on aurait pu y penser avant. Il y a toute une militance politique dans cette écologie, qu’elle soit sonore ou pas.

Propos recueillis par Dominique Demangeot

Back To The Trees, Saint-Vit, Bois d’Ambre, Samedi 25 juin 2022 en continu de 18h à 1h 
Prix libre 
www.backtothetrees.net

 

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