ROCK POP
Columbia
En congé de Depeche Mode, Dave Gahan s’offre une parenthèse dans les musiques et les paroles des autres. Loin d’être un imposteur, l’artiste fait honneur à ces douze titres entre standards et joyaux méconnus. Avec Rich Machin, du collectif de producteurs Soulsavers avec qui Gahan a collaboré en 2012 et 2015, le chanteur se fait crooner.
Si le spectre musical est particulièrement large sur cet album de reprises, Dave Gahan a fait siennes ces douze chansons, qui vont lorgner aussi bien du côté du blues graisseux (I Held My Baby Last Night qui rappelle les couleurs blues rock de Personal Jesus), que de la pop flamboyante (la belle reprise soul de James Carr, premier extrait de l’album, ou encore le lumineux Shut Me Down). De Chan Marshall, Dave Gahan reprend Metal Heart, et quitte le folk d’origine pour monter lentement vers des couleurs gospel, comme un retour cette fois à la verve de Condemnation sur l’album Violator en 1990. Crooner, disions-nous, Dave Gahan l’est souvent sur Imposter, comme lorsqu’il entonne Smile, à l’origine une composition de Charlie Chaplin pour son film Les Temps modernes. La voix de Depeche Mode se frotte aussi aux effluves doucereux de Lilac Wine, titre de James Shelton datant de 1950, mais véritablement popularisé en 1994 par Jeff Buckley sur son album Grace. Difficile de passer après Buckley et on pense indéniablement à lui lorsque l’on entend les premiers accords de Lilac Wine. Mais l’arrangement pour Dave Gahan comporte là encore quelques chœurs et sonne plus folk, et son timbre s’en va tutoyer des hauteurs de notes inhabituelles pour ce Dark Crooner de Gahan.
Du côté des standards, citons encore A Man Needs A Maid, le tube de Neil Young totalement revu ici, drapé dans les capes noires de Depeche Mode. L’absence de l’orchestre classique n’enlève rien au côté classieux de l’affaire. Les adeptes des princes de la synth pop des années 80 et 90 retrouveront les climats sombres qu’il apprécient tant, mais quand il chante un peu plus loin Not Dark Yet (reprise de Bob Dylan), Dave Gahan nous dit que l’espoir demeure pourtant. Comme un clin d’œil, en compagnie de Soulsavers il reprend sur la dernière piste un titre d’Elvis Presley, Always On My Mind, popularisé notamment par les collègues Pet Shop Boys en 1988.
– Dominique Demangeot –