BANDE DESSINÉE
Dupuis
Joann Sfar au scénario et Mathieu Sapin à l’illustration nous emmènent dans une aventure rocambolesque teintée d’espionnage et de S-F, un premier tome d’une série baptisée Le Ministère secret, où Nicolas Sarkozy et François Hollande, « la crevette » et « le pingouin », forment un improbable duo pour déjouer un complot mondial. Le Ministère secret est une organisation composée d’anciens présidents chargés de s’occuper des menaces les plus graves, celles dont le grand public ne peut avoir connaissance, au risque de déclencher une panique mondiale, c’est dire…
Dans cette BD « made in Chichery » (vous chercherez sur Wikipedia), Mathieu Sapin a mis au point une version cartoonesque de lui-même pour prendre part à l’histoire, son alter ego de papier étant embarqué bien malgré lui dans une aventure pleine de rebondissements… et de sang. Il faut dire que les mystérieux aliens (et même quelques ninjas) aux prises avec un colosse de granit, Yaacov Kurtzberg (hommage discret au dessinateur de Marvel Jack Kirby), ne font pas dans la dentelle lorsqu’il s’agit de défendre leurs intérêts. Sapin et Sfar ne prennent pas davantage de gants pour brosser les portraits des deux présidents pour le moins dépareillés, Hollande et son éternel scooter, Sarko et ses lunettes de soleil. Les ennemis, eux, semblent déterminés à s’approprier les pouvoirs de Yaacov, qui rappelle beaucoup la « Chose » des Quatre Fantastiques, des ennemis qui sont de plus capables de prendre n’importe quelle apparence (là on sera plus dans la kitschissime série télé V, en ce qui concerne les reptiles extra-terrestres malveillants). Ce premier tome du Ministère secret décline avec efficacité ses différentes références sans se prendre au sérieux. Et ça marche !
Mais le duo d’anciens présidents n’est pas le seul binôme de cette histoire puisque les circonstances vont amener le mystérieux homme de pierre et Mathieu Sapin à faire équipe eux aussi, dans cet album, premier d’une série de trois tomes, où la géopolitique s’invite également. Les « grands de ce monde » sont nombreux dans Héros de la République, de Poutine tous muscles dehors, chassant le tigre blanc avec le Prince de Monaco (si si) jusqu’à Donald Trump et son QI dans les chaussettes. L’humour (voire l’auto-dérision en ce qui concerne Mathieu Sapin, on salue sa douce épouse) se rencontre à presque toutes les cases. Quant à l’intrigue menée tambour-battant avec combats, courses-poursuites, et même une épidémie (c’est dans l’air du temps), elle n’empêche pas les bons mots de fuser très souvent. La bande dessinée fait de nombreuses références à l’actualité et l’on ne peut s’empêcher de penser aux précédents travaux de Mathieu Sapin qui a notamment croqué la campagne de François Hollande et son passage à l’Élysée. Le dossier secret en fin d’album ouvre d’autres pistes qui donnent envie d’en savoir davantage dans le deuxième tome de cette bande dessinée, qui peut aussi être vue comme un pastiche désopilant de Men In Black.