Doudou Morizot – Je les ai tous vus débuter

RÉCIT / TÉMOIGNAGE

L’Archipel

C’est au 28 boulevard des Capucines que nous convie Roger Morizot, que tout le monde dans le métier appelle Doudou. Durant 34 ans, il a été le régisseur de la mythique salle de l’Olympia, ancien cinéma racheté en 1954 par Bruno Coquatrix, qui l’a dirigé de main de maître jusqu’à son décès en 1979. Mais ce dernier n’a jamais eu le temps ou l’envie de coucher sur le papier tous les souvenirs, qui se ramassent à la pelle et qu’un tel lieu engendre forcément. Alors c’est Doudou qui s’y est collé pour nous raconter sa « famille du spectacle ».

Doudou Morizot - Je les ai tous vus débuter - L'Archipel - Chronique livre

Le « virus de la scène », Roger Morizot l’a contracté en allant voir des spectacles à Paris au début des années 50, un ami concessionnaire l’invitant à l’Alhambra, au Bataclan et autres salles parisiennes. Alors que le jeune Morizot travaille au cirque pour Joseph Bouglione, ce dernier le « prête » à Bruno Coquatrix qui doit faire décorer l’Olympia. Morizot s’y rend et n’en repartira que 34 ans plus tard, apprenant à maîtriser les lumières, la console son, confectionnant les décors, accueillant les artistes, tentant de satisfaire à leurs demandes parfois extravagantes, devenant parfois leur confident, ou seulement cette présence discrète mais nécessaire qui change tout. Je les ai tous vus débuter vaut notamment pour les nombreuses anecdotes que nous offre son auteur sur la pléthore de vedettes passées par la scène de l’Olympia, brossant leurs portraits en quelques anecdotes, de la Môme Piaf, au destin à la fois beau et tragique, tout comme celui de Dalida, jusqu’au couple diabolique Johnny et Sylvie, en passant par beaucoup d’autres. La scène… mais aussi, et peut-être surtout les coulisses, car l’ouvrage nous donne accès aux petites confidences distillées par certains artistes, des comportements, des sentiments qui n’ont pas toujours leurs places sous les feux des projecteurs.

La grande famille du spectacle

Le monde du spectacle est un univers à lui tout seul, un microcosme avec ses lois, ses personnages, et bien sûr ses métiers, dont celui de régisseur, que Doudou Morizot nous expose dans toute sa complexité, surtout à l’époque. Sa carrière ne fut pas de tout repos, notamment lorsqu’il a fallu partir en tournée pour le « Johnny Circus », aventure pour le moins rocambolesque, ou carrément à travers les États-Unis en compagnie des Platters. Les petites et les grandes histoires de l’Olympia abondent, à l’image du « champ de bataille » laissé par Gilbert Bécaud après ses concerts, avec son public féminin électrisé (on ne l’a pas surnommé Monsieur 100.000 volts pour rien). Au nombre des stars appréciées par Doudou Morizot, on retient notamment Paul Anka, sa gentillesse et sa simplicité, Aznavour, entres autres artistes. Mais Doudou Morizot a aussi la dent dure avec certain.e.s autres, dans ce qu’il nomme le « rayon des emmerdeurs », et là encore les anecdotes ne manquent pas !

Un livre à quatre mains

On retient aussi de l’ouvrage le travail accompli par Emmanuel Bonini, grand spécialiste de la musique, qui a co-écrit l’ouvrage, aidant Roger Morizot à ordonner ses souvenirs. L’auteur est notamment parvenu à rendre la verve de ce vrai gosse de Paris, un Titi parisien comme on dit, porté sur l’argot et élevé à la dure dans le ventre de la capitale. On reconnaît d’ailleurs sa maîtrise du sujet lorsque sont évoquées des artistes de la trempe de Josephine Baker ou encore Dalida, sur lesquelles Emmanuel Bonini a publié des ouvrages. Avec son livre de souvenirs, Roger « Doudou » Morizot évoque la nostalgie d’une époque finalement heureuse où « tout se passait de manière bon enfant », même si les larmes ont parfois coulé, tout en rendant hommage aux difficiles métiers d’artistes et de techniciens, tellement mis à mal ces derniers temps.

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