Article publié à l’origine dans l’édition février-mars 2018 du journal Diversions – consulter le PDF ici –
La Biennale internationale Corps-Objet-Image se tiendra à Strasbourg du 16 au 24 mars prochains. Les Giboulées 2018 accueilleront une fois encore de nombreux artistes qui évoqueront diverses thématiques, ayant trait à l’actualité et à l’histoire, à l’image d’Eldorado Terezín dont nous vous parlions en novembre dernier, ou encore s’interrogeant sur leurs pratiques artistiques.
Le 17 mars à 16h30, au MAMCS, Ola Maciejewska s’inspirera de la “Dancing Dress” conçue par Loïe Fuller. Loïe Fuller: Research jouera ainsi sur les effets de drapés, sur des vêtements qu’Ola a conçus elle-même, évoquant également l’art de la sculpture. Les Giboulées 2018 nous démontreront une fois encore toute la diversité de cet objet dont nous entretient le directeur du TJP depuis son arrivée à la tête du Centre Dramatique National d’Alsace, support de création multiforme. Avec Harmonie, Cristina Iosif plonge au cœur de la matière pour constituer le décor de sa pièce. La metteuse en scène joue avec la matière en investissant son intérieur intime, usant d’un dispositif macroscopique. Il faut dire que parfois, les artistes peuvent recourir à des technologies très pointues, à l’image d’Amit Drori qui avec Monkeys nous présente des singes robotisés. L’occasion de s’interroger sur les répercussions des nouvelles technologies sur le vivant. Dans Artefact, Joris Mathieu recourt quant à lui aux imprimantes 3D et à un bras articulé, dans son spectacle dénué d’interprète humain sur scène. Là encore, le surgissement de l’intelligence artificielle suscite de nombreuses questions en lien avec le devenir de l’espèce humaine, une thématique prenant comme cadre ici le spectacle vivant. Catherine Poher, architecte et plasticienne, a recours aux arts plastiques et aux ombres pour créer l’univers de A, l’artiste nous conviant à une exposition. A fait partie d’un cycle de création autour du Paradis, « celui que nous cherchons, que nous avons perdu, petit, grand, végétal, matériel ou immatériel », soulignent Paolo Cardona et Isabelle Hervouët de la compagnie Skappa! Mais la matière peut aussi être la voix, le mot, comme dans Kèlécètectoplasme kitacompagne ?.
Julie Nioche est quant à elle chorégraphe, et place ainsi le corps au centre de sa création artistique. Dans Nos amours, elle est partie de différentes techniques somatiques pour que les deux interprètes se trouvent dans des états physiques différents. L’autre colonne vertébrale est la partition des Variations Goldberg de Glenn Gould. « Nos Amours rend hommage aux différents amours qui accompagnent, traversent nos vies et laissent des traces dans nos corps », explique la chorégraphe. Le corps de l’artiste, toujours, sera également central dans Man Anam Ke Rostan Bovad Pahlavan, Ali Moini cheminant aux côtés d’un grand pantin, leurs deux corps intimement connectés grâce à un système de poulies. À l’instar de Renaud Herbin et Célia Houdart dans La vie des formes, cette pièce d’Ali Moini s’interroge sur la relation et les interactions entre le créateur et sa marionnette, sur ce lien magique donnant vie à une forme inanimée.
Les Giboulées feront aussi bien sûr une place à la marionnette proprement dite, particulièrement réaliste avec Uta Gebert, qui dans Solace, met aux prises danseuse et marionnette, ou au contraire jouant avec le théâtre d’ombre, comme Fabrizio Montecchi dans Le canard, la mort et la tulipe, une fable philosophique sur la vie et la mort, traitée avec beaucoup de poésie par la compagnie slovène, le Théâtre de marionnettes de Ljubljana. On retrouvera Célia Houdart et Renaud Herbin aux côtés de ces derniers avec Open the Owl, suite du Château des hiboux, créé à Ljubljana en 1936, l’exploration d’un castelet qui s’avère être un monde en mouvement perpétuel. Avec Arde brillante en los bosques de la noche, on changera de décor pour le Buenos Aires contemporain, autour de la notion de révolution bolchévique et du parcours de trois femmes entre Amérique du Sud et Europe. La transversalité et l’expérimentation sont de rigueur ici encore, puisque la pièce mêle théâtre de marionnettes, jeu et cinéma.
– Manu Gilles, Dominique Demangeot –
Les Giboulées 2018, TJP et autres lieux, Strasbourg, du 16 au 24 mars
www.tjp-strasbourg.com